Aléatoirement s’ouvre autour des choses des espaces de curieuses rencontres et, à l’occasion, si l’on s’y loge, si on se situe à l’exacte rencontre des objets, c’est comme si nous étions soudainement là où il se passe quelque chose. Nos pièces habituellement vidées de toutes éternités sont comme ramenées à un magma originel, une fusion où la rencontre d’un fil orange et d’une chaise est semblable à l’explosion d’une étoile, à l’effondrement d’un astre ou à je-ne-sais-quel événement cosmique dont l’ampleur est tel qu’il change la nature même des choses. Il faut peut-être atteindre une certaine forme de fatigue pour toucher à ce dépaysement, pour dénommer les objets au point de les rendre à ce qu’ils sont primitivement : de simples formes, de purs amas de matière. Que dire alors du baiser entre deux livres qui n’ont rien à voir entre eux ? De l’équilibre précaire d’une table posée sur la tranche et d’un étendoir à linge ? Me voilà avec une pièce si déménagée, si déconstruite et désorganisée, qu’elle me donne l’image même d’un monde et je suis, comme avant dans la voiture lors des grands voyages, égaré en un lieu qui n’a pas de secret pour moi.