ce qu’ils font c’est chercher de nouvelles manières
de nous déchirer le ventre
mais nous
nous avons le ventre ouvert
depuis mille ans déjà
ils l’ignorent et continuent
sont-ils fous
sont-ils fous de penser que nous ne bougeons pas
que nous nous laissons faire
dépecer vivantes durant un millénaire
comme si nous n’avions rien de mieux à faire que
perdre nos viscères
dans les rues de leurs villes incendiées
sont-ils fous
de croire ce que nous avons choisi c’est
de ne plus jamais nous recoudre
de ne plus jamais nous recoudre et laisser
ouverte la porte de notre ventre entier
car la peau étalée dévore le couteau qui tranche
comme l’écume dévore le gravier
sont-ils fous
d’aiguiser les lames pour dévorer nos viscères
nous qui sommes semblables au ciel
que des enfants croient crever
à coup de légères pierres
la pluie de nos poumons inonde
l’étal de ces bouchers
dans la guerre nous passons
de plaines en plaines comme des ombres
écorchées vives comme des ombres
il suffit d’aller où
couvre l’orage de nos torses déployés
sont-ils fous
de croire que nous aimons mourir
quand ce sont eux qui aiment se tuer
nous sommes le dos d’une armée
que la tempête vient calmer