Le musicien – trentième lettre.

Le musicien – trentième lettre.

L’adjoint au chef de notre prison est un saxophoniste hors pair. Il réside dans une aile de l’édifice carcéral réservé à l’administration pénitentiaire et il joue, à partir de dix-huit heures et jusqu’à dix-huit quarante-cinq, de grands classiques du jazz avec son saxophone.

Mais, je te vois venir. Le romantisme d’un être-du-dehors tel que toi, te pousse sans doute à croire que ces quarante-cinq minutes de musique sont les plus merveilleuses ou au contraire les pires de journée entièrement carcérale. Vous autres, dehors, vous considérez la musique comme la plus haute manifestation de l’énergie spirituelle. Mais, sache que nous autres prisonniers, nous ne considérons pas la musique. NOUS NOUS EN FOUTONS ROYALEMENT.

La musique de notre adjoint au chef n’est qu’une nuisance de plus dans le panel des nuisances infinies dont la prison est faite. Quand l’adjoint au chef dépasse son heure et qu’il joue encore à l’heure de la distribution du repas, nous, nous espérons simplement pouvoir manger tranquillement.