Fruits

FRUITS

Je frappe le visage. Je le frappe. Je frappe à ton visage. Je frappe. Tes lèvres sont frappées – fendues. La bouche saigne. Je vois la bouche saigner – le sang dans la bouche, le métal que le sang fait. Le visage est frappé. Des bleus paraissent. Le visage est tuméfié – de grosses larmes coulent. Pleurer, le visage sait le faire – des grosses larmes coulent. On frappe le visage. On frappe à mon visage. Pleurer mon visage sait le faire. Ma bouche est fermée. Mes dents cassées sont cachées derrière la lèvre inférieure. La lèvre inférieure est recouverte de rouge. La lèvre supérieure fendue. Une porte déchirée – la clôture est ouverte. Je frappe à mon visage. Mes joues bleuis grossissent. Mes larmes grossissent. La colère grandit. La tristesse grandit. Sous mon visage, la colère. Le fruit de la colère grandit. Sous mon visage le fruit de la colère murit. Le sang coule. Le rouge est partout – la gorge est colorée. La lèvre supérieure tremble. Les dents brisées de colère. Le palais coupé. Les incisives avalées dans la gorge. La colère pousse. Le fruit de la colère grossit. La branche de la colère penche. Le visage est bleu. Le visage est gonflé. La colère a grandi. La tristesse a grandi. Je frappe la colère. La gorge découverte de la colère – sa pomme d’Adam macabre. L’arbre ploie sous la pluie rouge sang. Le bruit des canines brisées. Le bruit de verre cassé. Le sol de mon visage couvert d’immondes. Un fleuve coule. La lèvre inférieure couverte de colère. On frappe à ton visage. On frappe à la porte de ton visage. La porte cassée – le verrou brisé de ton visage. Pleurer, le visage ne sait plus faire. Seuls les yeux pleurent encore. Les paupières sont bleuies. La rétine est crevée. Les dents cassées remontent du palais aux yeux clos. Le sang rouge coule contre la joue. La colère grandit et refroidit. La tristesse est gelée. L’hiver passe dans le visage – derrière lui, comme un masque. Le visage apprend à pleurer tout entier. Plus lourd que le plus lourd de fruit le visage grandit dans la colère.