en rendant la clef je t’ai
pulvérisé

non seulement tes traces
annihilées
par cette longue lessive des sols
à la résine de pin

mais aussi la possibilité
d’un retour sur les lieux

l’épave qui s’effondre, en moi
pendant que je frottais les lattes
et que j’écoutais
le vent dans la haie de laurier palme

s’émiette encore
comme s’il ne s’agissait pas de faire place nette
mais de se dégrader le plus possible
jusqu’à se réduire à l’écharde

écharde qui n’est pas rien mais
une lance
une lance pour le fantôme
qui en ton honneur combat

te défend comme le champion
d’un vieux roi impotent

souverain qui délègue son honneur
à un être qui ne lui ressemble en rien

qui est son opposé

comme ma mémoire vivante est
parfait contraire de ta disparition

comme ma douleur vivante est
parfait contraire de ta sérénité

s’il est vrai que les morts font
dans les murs un terrier
pour nous hanter encore

alors
rendant la clef je te
pulvérise

le néant se détruit-il
comme on lave un parquet
ou ne pourrais-je jamais
que couvrir l’odeur
du vide que tu laissas





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